Si vous connaissez un peu le shiatsu, vous avez déjà entendu parlé (un peu, beaucoup) de Carola Beresford Cooke 🙂
Dans cette interview pleine de spontanéité, de sincérité et de sagesse, cette grande dame du shiatsu nous livre sa vision du sujet, comment elle l’expérimente depuis 40 ans et quelle a été son évolution. Elle nous parle également des aspects scientifiques autour de la science du toucher, et comment elle voit le futur de notre épanouissante discipline.
Je crois que ses mots feront écho à beaucoup…
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Bon visionnage ! 😉
Ludivine Dumontet : Bonjour à toutes et à tous, et bienvenue sur le blog www.bienetreparleshiatsuetledoin.com. Aujourd’hui, nous avons l’immense honneur de recevoir Carola Beresford Cooke. Bonjour Carola.
Carola Beresford-Cooke : Bonjour Ludivine ! Bonjour tout le monde.
Ludivine Dumontet : Comment allez-vous ?
Carola Beresford-Cooke : Très bien, merci.
Ludivine Dumontet : Vous êtes célèbre pour être l’auteure du best-seller « Shiatsu, théorie et pratique ». Vous êtes également une des co-fondatrices du Shiatsu College en Grande Bretagne, dans les années 80, et vous avez enseigné dans le monde entier. La première question que j’ai pour vous est – je pense que notre auditoire serait très intéressé de savoir ce qu’est le shiatsu pour vous, comment est-ce que vous vivez-vous le shiatsu depuis toutes ces d’années ?
Les différents éléments à appréhender en Shiatsu
Carola Beresford-Cooke : Et bien, j’adore le shiatsu. J’adore recevoir un shiatsu. Et je crois que c’est quand on reçoit un shiatsu que l’on en comprend toute la portée. Et je crois que beaucoup de praticiens commencent par là. Ils reçoivent un shiatsu et ils disent : ‘ »Waouh! C’est génial ! ». Puis ils veulent l’apprendre, pour pouvoir reproduire ce truc qui les fait se sentir si bien.
En tant que receveur, j’ai expérimenté le « toucher shiatsu » ; et le toucher shiatsu, principalement (pour moi), est très profond. Personnellement, j’aime lorsqu’il est physiquement profond. C’est le toucher qui me convient parce que je suis très très cérébrale, très mentale. Et un shiatsu en profondeur me ramène à mon corps et aide à calmer mon esprit, et c’est vraiment comme ça que j’arrive à me détendre.
Shiatsu physique vs. Shiatsu « énergétique »
Malgré tout, la pression n’a pas besoin d’être profonde. Je sais que pour certains, souvent les hommes par exemple, ou pour le personnes physiquement très développées, le shiatsu doit être très physique et profond pour qu’ils ressentent quelque chose. Par contre pour d’autres, en particulier pour ceux qui reçoivent beaucoup de shiatsu, et qui sont plus en phase avec comment leur Ki fonctionne, peuvent recevoir un shiatsu profond, « énergétiquement » parlant, avec le Ki. Là où l’influence est grande. Pour ces personnes là, même si le toucher est léger, il donne la sensation de pénétrer en profondeur, et change quelque chose profondément en vous.
C’est ça qui est vraiment important pour moi. Il y a les deux aspects : j’aime la profondeur physique de la pression, mais également la profondeur « énergétique » du toucher. Une autre qualité du shiatsu, c’est qu’il se diffuse, il n’est pas cantonné à un seul endroit. C’est la grande différence avec les Méridiens. Les Méridiens transportent le Ki à différents endroits du corps. Et le système des Méridiens, Jing Luo, est semblable à un réseau, une toile. C’est comme cela que le réseau de Méridiens est nommé en chinois, et je crois aussi en Japonais avec les Keiraku. Et donc, ce réseau qui transporte les effets du toucher dans les différentes parties du corps, c’est également une sensation merveilleuse, je crois.
Vous savez, mon père était médecin. Et quand j’étais toute petite, je me revois lui demander des trucs du genre : « Papa, pourquoi est-ce que quand je m’écorche le pied, j’ai un picotement étrange derrière l’oreille ? ». Je crois que vous voyez de quoi je parle. Et mon père ne m’a jamais vraiment donné de réponse satisfaisante. Il marmonnait quelque chose autour du système nerveux, ce qui n’était pas tout à fait convainquant pour moi, donc. Ce n’est qu’un exemple, mais nous ressentons ce réseau de Méridiens de toute façon, comment le Ki fonctionne dans le corps. Et quand on reçoit un shiatsu, on en devient encore plus conscient, je crois.
Ludivine Dumontet : Très bien. Et en tant que donneur, quel est votre ressenti ?
L’importance du Hara
Corola Beresford-Cooke : « En tant que donneur ». Ca, c’est mon truc. Par quoi vais-je commencer ? Le shiatsu est une forme très très spéciale de travail du corps. Vous savez. Masunaga a appelé son centre, son école à Tokyo, « Iokai », ce qui veut dire « Roi » ,en japonais. Et il y a une sorte de consensus sur le sujet, sur le fait que le shiatsu soit le « roi du travail du corps ». Et le travail du corps est lui-même une forme de thérapie très largement sous-estimée. Il dépend tellement de l’expérience, du contact… Vous devez tellement utiliser votre centre, votre centre vital pour donner un shiatsu.
Vous devez utiliser votre Hara, votre centre là en bas. Vous devez l’utiliser pour gagner en force, et en énergie. Vous devez énormément utiliser ce centre pour vous connecter et pour résonner avec votre receveur. Et en shiatsu, en particulier, vous devez utiliser ce centre (le cerveau). Pour la compréhension de ce que vous faites et pour votre capacité à appréhender tout cela. « Pourquoi je fais ça? Pourquoi est-ce que je ressens ça ? Comment je change ça? Comment je change ça, et comment je fais pour maintenir malgré tout ma connexion du Coeur? » Vous savez, le shiatsu est quelque chose de complexe. C’est un métier incroyable que le nôtre, je crois !
La connexion du Coeur
Il y a une base théorique, qui est superbe, sur laquelle on a pas vraiment besoin d’insister, mais qui nous permet d’avoir une certaine compréhension de la personne : pourquoi a-t-elle telle ou telle problématique ? Quel type de personne est-ce ? Quelle est la meilleure façon de l’aborder ? Toutes ces questions procèdent de la théorie. Et puis il y a la connexion du Coeur, qui elle, est très importante. Et je trouve qu’on passe parfois un peu à côté en shiatsu. La connexion du Coeur, ça veut dire la volonté d’être en soutien. Ensuite il y a la connexion du Hara. Nous nous entraînons, nous entraînons nos corps à cela comme dans aucun autre travail du corps. Quand on apprend un massage, on apprend juste des techniques, mais après, vous êtes seul avec vous-même.
La discipline du corps et de l’Esprit
Alors qu’avec le shiatsu, vous apprenez, vous apprenez à développer votre Hara, vous apprenez à calmer votre esprit, vous apprenez à écouter différentes parties de votre corps et ce qu’elles ont à dire, et vous apprenez à l’appliquer. Et tout ceci s’obtient par la discipline du corps et de l’esprit. Nous utilisons ces concepts quand on pratique le shiatsu. On apprend à apaiser l’esprit avec la méditation, on apprend à utiliser notre respiration. On apprend le Qi Cong pour comprendre comment le Qi se déplace dans notre corps. Oui, Ludivine, vous vouliez dire quelque chose ?
Ludivine Dumontet : Oui… Non… C’est difficile pour moi de vous interrompre. C’est très intéressant. Juste un complément peut-être, parce que je suis très intriguée par ça. Vous pratiquez depuis plus de 40 ans maintenant. Comment avez-vous évolué dans votre pratique ? Est-ce qu’il y a une différence entre comment vous abordez la pratique du shiatsu aujourd’hui, et lorsque vous avez commencé ?
Carola Beresford-Cooke : Le voyage du Shiatsu. Oui… Le voyage du shiatsu est le voyage de toute une vie ! N’est-ce pas ? Et je crois qu’on a tous un vécu différent de comment c’était au début, quand on a commencé. Et j’ai la conviction que nos premiers pas en shiatsu sont très formateurs. J’aime toujours bien recevoir un shiatsu de quelqu’un qui débute. Parce qu’il y a l’avantage de l’innocence, on utilise juste le poids de son corps. Il y a aussi l’avantage du « Je ne sais pas », qui est touchante, et qui me permet de sortir de mon rôle habituel de donneur.
Ensuite il y a une période que vous traversez – et je n’y ai pas échappé, où j’était tellement dans le mental, que c’était « la théorie, je veux de la théorie ! Je veux comprendre ce que je fais! » Et bien sûr, quand j’ai commencé dans les années 70, personne ne savait ce qu’il faisait. On ne savait vraiment rien. On ne comprenait pas ce qu’on faisait, on ne comprenait pas le Ki, et il n’y avait pas vraiment de bonne théorie disponible. Parce que Masunaga n’avait pas encore terminé sa théorie. Et Namikoshi avait une tout autre approche. Et ces deux écoles étaient les seules de l’époque. Donc beaucoup d’entre nous se sont dirigés vers la macrobiotique, parce qu’il y avait de la littérature là-dessus.
Et bon, moi je me suis dirigée vers l’acupuncture. Et à cette époque, la seule école qui enseignait l’acupuncture en Angleterre à temps partiel et pour laquelle vous n’aviez pas besoin d’être médecin, était l' »Ecole des 5 Eléments » de Lemington. Et donc tous ceux qui voulaient étudier l’acupuncture et la théorie sur le médecine orientale allait là-bas. Et je pense que c’est important pour comprendre l’histoire de l’enseignement du Shiatsu en Europe. Et pourquoi elle est imprégnée de l’Ecole des 5 Eléments, de cette école particulière et de ses exigences. Mais vous savez, c’était plus accessible que n’importe quelle autre école. Mais bon, je me suis formée à l’acupuncture, mais je voulais toujours plus de théorie, et blablabla.
Le pouvoir de l’écoute du corps
Et puis ensuite j’ai été dans ma période de « Une solution pour chaque problème ». Et c’était ça je le savais : « Si je fais ce point, et que je le fais comme ça, une solution pour chaque problème, revoir. » « Venez, une solution pour chaque problème, merci et au revoir ». Et j’ai eu de très très mauvais résultats en procédant ainsi. Ce n’était vraiment pas une bonne approche.
Ludivine Dumontet : Ca ne marche pas comme ça.
Ecouter le corps
Carola Beresford-Cooke : Non, absolument pas ! N’est-ce pas ? Un jour j’ai eu une rencontre exceptionnelle avec un vieil homme plein de sagesse. J’étais désespérée. Vraiment. Je me disais : « Je ne peux pas le faire, ça ne marche pas. Je vais devoir abandonner le shiatsu. » Vous avez connu ça aussi ?? Et puis cet homme extraordinaire est venu en séance et il n’arrêtait pas de se lamenter sur ses problèmes, « J’ai ci, j’ai là », et je me disais : « Ok..oula..bon… » Et je lui ai dit : « Je dois vous avouer quelque chose : je ne suis plus trop dans le truc d’aider les gens. »
Ludivine Dumontet : Vraiment ? Vous lui avez dit ça ?
Carola Beresford-Cooke : Oui, j’ai dit ça ! Son visage s’est illuminé, il était transformé et il a dit : « Et bien c’est parfait ! Parce que je ne veux justement consulter personne » ! Et je je lui ai répondu : « Comment voulez-vous qu’on travaille ensemble alors ? « Et bien, faites juste quelque chose, et je me débrouillerai avec. » Et j’ai dit « D’accord. » Et on a commencé à travaillé sur ces bases là, et j’ai pris conscience de ce qu’il faisait de son côté, parce qu’il était plutôt bon en auto-guérison, et il voulait juste un petit coup de pouce de ma part, ici ou là, et puis ensuite on échangeait. C’était génial. J’ai vraiment progressé avec lui. Et à partir de là, je dirais que mon shiatsu s’est beaucoup plus centré sur l’écoute. Plus que sur le faire ou le parler, ou de dire aux gens avec mes mains ce qu’il devraient faire.
J’ai eu beaucoup de feed-back de la part de mes jushas. Il y a une femme par exemple qui m’a dit un jour : « Ecoutez, je ne reviendrai pas. Parce que j’ai l’impression que vous voulez faire faire à mon corps ce qu’il ne veut pas » Je n’avais pas écouté. On continue…
Ludivine Dumontet : Vous vouliez ajouter quelque chose à propos de votre parcours ?
Entraîner le corps, l’Esprit, le Coeur
Carola Beresford-Cooke : Et bien, je dois admettre que, plus récemment, je suis devenue plus éclairée sur le pouvoir de l’écoute du corps. Et peut-être connaissez-vou le Seiki, et à quel point c’est en vogue ? Le Seiki, c’est vraiment une forme très très simplifiée de Shiatsu, où vous touchez simplement, vous écoutez, et vous suivez le Ki, sans rien faire de spécial. Vous ne travaillez pas les Méridiens, vous suivez plutôt ce que le corps de votre receveur veut faire, plutôt que de faire vous-même. J’ai fait un stage de 2 jours avec Alice Whieldon et j’ai été très impressionnée. J’ai trouvé ça extraordinaire. J’aime vraiment beaucoup cette approche.
Et puis, (le shiatsu) c’est très exigeant physiquement, quand on vieillit, comme moi, il y a une certaine fatigue physique qui s’installe quand on fait du shiatsu. Ca peut même vous arriver avant d’être vieux ! Une de nos élèves du Shiatsu College a dit un jour : « Vous savez, il y a des jours à l’institut où vous vous dites : « oh non, pas encore une jambe ! ». Je me suis dit qu’elle avait exactement capté le ressenti qu’on peut avoir par moment « Oh non, pas encore une jambe ! ». Avec le Seiki, vous n’avez pas à gérer de ce genre de situation.
Avec le Seiki, vous êtes juste à l’écoute, et vous considérez la personne comme un tout, et donc je n’ai pas à travailler une jambe puis l’autre. Je touche, simplement, et j’écoute. Mais ça demande une énorme discipline de travailler de cette façon. Ce n’est pas quelque chose que vous pouvez faire facilement. Et je crois que c’est le cas pour tout travail du corps à haut niveau -et vous me demandiez à propos de ma propre évolution, je pense que plus j’avançais, plus je réalisai l’incroyable niveau d’auto-discipline que cela exige. C’est un voyage sans fin. Entraîner le corps, entraîner l’Esprit, d’entraîner le Coeur. Ecouter, être en ouverture, être compétent, c’est un voyage sans fin et qui nécessite de la discipline aussi. Et je crois que j’en suis là. Je suis plus dans l’optique d’entraîner mon Ki, que de travailler sur le corps, avec « encore une jambe », comme à l’institut.
Ludivine Dumontet : Vous nous parliez tout à l’heure du Ki, du Hara, tous des concepts qui nous viennent de la Chine et du Japon. Dans votre livre, vous parlez aussi d’énergie en termes de physique.
Carola Beresford-Cooke : L’approche scientifique.
L’approche scientifique du shiatsu
Ludivine Dumontet : Oui c’est ça, l’approche scientifique du Shiatsu. Pouvez-vous nous en dire plus sur le sujet ? Le concept de champ électro-magnétique m’intéresse par exemple.
Carola Beresford-Cooke : Oui. Alors, il y a vraiment un base scientifique au shiatsu. Et il y a deux façons d’aborder la chose. La première est de constater ce qui se passe lorsque vous appliquez une pression sur le corps. Ca, c’est de la physique de base. Mais ça n’a pas été vraiment étudié. Quand vous exercez une pression sur le corps, il y a une sorte d’électricité qui est créée, au niveau du tissu conjonctif. Et ce dernier devient beaucoup plus fluide, comme s’il fondait sous la pression. Il est plus enclin à changer de texture. C’est pour ça que l’aspect physique, la pression profonde du shiatsu est en fait assez significative dans le travail du corps.
Ludivine Dumontet : Vous voulez dire qu’un message est transmis ?
Les fascias
Carola Beresford-Cooke : Un message est envoyé, oui ! Il y a toute une théorie sur les fascias dans le corps. Comment dites-vous fascias en français ?
Ludivine Dumontet : pareil.
Carola Beresford-Cooke : Il y a toute cette théorie sur les fascias. Il y a toute cette théorie sur les fascias. Vous savez, quand vous coupez de la viande, et que vous arrivez sur cette couche de tissus fin, perlé, nacré qui se trouve entre les muscles. C’est du tissu conjonctif, et on en trouve partout dans le corps. Il voyage entre toutes les parties du corps. Et pendant longtemps, ceux qui s’intéressaient aux Méridiens, étudiaient les lieux où les fascias se touchent, il a un espace entre.
Très souvent, les Méridiens courent dans cet espace. Cet aspect perlé du fascia naît d’une organisation très ordonnée des molécules qui le composent, et il ressemble beaucoup à l’organisation des molécules de cristal. Et le cristal transporte et stocke des informations. Il y a donc cette théorie qui dit que les fascias transportent de l’information dans le corps, partout dans le corps. Entre les muscles, les vaisseaux sanguins, les organes et les glandes. Partout, ils sont de partout. Le long des nerfs… Donc ce réseau est de partout, tout comme le réseau de Méridiens. Et il y a cette idée que les fascias transportent et stockent de l’information. Ca, c’est tout l’aspect physique de la chose.
La théorie des champs électromagnétiques
L’autre aspect intéressant est la théorie des champs. Tout a un champs (électro-magnétique). Tout object physique a un champ, parce que les électrons se meuvent à l’intérieur, vous voyez, même s’il s’agit d’un objet semi-liquide, les particules se déplacent à l’intérieur. Les êtres humains ont un champ également. Et le plus grand organe qui génère le champ de l’être humain, c’est le coeur.
Le coeur possède un champ électro-magnétique plutôt grand. On s’en sert en science quand vous passez un électro-cardiogramme (ECG). Il utilise, il lit, le champ électro-magnétique du coeur. Et il va très loin. C’est un champ faible, mais ça ne veut pas dire qu’il soit petit. Il y a quelque chose que trouve ça intéressant : plus le matériel utilisé pour mesurer le champ du coeur est sensible, plus on perçoit que le champ s’étend encore plus loin, et encore plus loin. Et ils n’ont toujours pas trouver où il s’arrête ! Il est toujours présent, le champ du coeur. Je trouve ça de toute beauté. C’est merveilleux. Les yeux également ont un champ assez puissant. Le cerveau également. Et le corps aussi certainement, qui seraient une combinaisons de ces derniers.
Autre chose, qui je pense fait débat, parce que bien sûr, maintenant on se rapproche de plus en plus du point critique sur la « médecine énergétique », et plus on se rapproche de la vérité sur ce que nous faisons, plus cela fait débat. Il y a donc quelques polémiques sur le sujet. Il y a une résonance quand deux personnes se rencontrent, une sorte de synchronisation. Leurs champs résonnent l’un avec l’autre. Et bien sûr, on peut s’entraîner à lire le champ de quelqu’un d’autre, et je crois que les personnes qui sont proches arrivent bien à le faire, n’est-ce pas ?
Quand votre partenaire débarque dans le pièce et vous vous dites « Oh oh… toi, tu es de mauvaise humeur! » Même s’il n’a pas prononcé un mot. N’est-ce pas ? C’est parce qu’on est synchronisé avec l’autre. Vous savez, les Chinois ont un mot pour ça. « Yuan ». Le pouvoir du « Yuan ». C’est quelque chose que l’on retrouve entre le médecin et son patient. Une sorte de résonance. Elle existe aussi entre mari et femme, avec le membres d’une même famille…. « Yuan », c’est une sorte de connexion énergétique. Je crois qu’on peut aussi relier ça à la théorie des champs.
Ecrire sur le shiatsu
Une des raisons pour laquelle le travail du corps a été très longtemps dévalorisé, par rapport à l’acupuncture, par exemple, c’est parce qu’il dépend tellement de ses messages subtiles qui passent entre le donneur et le receveur, et les sensations éprouvées, la « connexion du champ » si on veut. Et il n’y a que très peu de littérature sur le sujet. On a tellement d’écrits théoriques et pratiques sur l’acupuncture, et pratiquement rien sur le Shiatsu. Et une partie de ma vision pour le futur du Shiatsu, c’est le développement d’écrits sur le suejt. Que les gens aient le courage de d’écrire sur leurs ressentis, sur ce qui se passe lorsqu’ils donnent un shiatsu, sur ses effets, sur les résultats qu’il peut donner.
Quoi que ce soit. Ecrire sur le Shiatsu, c’est vraiment ce que j’encourage à faire. Parce que, bien qu’il soit le Roi du travail du corps, il y a vraiment presque rien sur le sujet. Et vous savez, ça demande su courage. C’est de la poésie. On ne devrait pas en parler en termes scientifiques. On devrait en parler en terme de poésie. Oh ! on peut en parler en termes scientifiques dès lors que des éléments scientifiques seront disponibles. Mais vous savez, c’est quelque chose que l’on peut décrire sur la base de notre propre expérience. Et je crois que ça, c’est d’une grande valeur.
Ludivine Dumontet : C’est beau.
Carola Beresford-Cooke : En fait la théorie des champs peut être très utile pour nous, pour comprendre. Il y a une discipline appelée bioénergie. C’était même une thérapie il y a un certain temps de cela. Je ne sais pas où ça en est maintenant. Mais la bioénergie consiste à reconnaître votre propre champs, et à vous en servir, l’entraîner à vous aider à expérimenter la vie d’un point de vue différent. Et je pense que c’est très utile en shiatsu. Quand j’enseigne, j’essaie d’entraîner les gens à ressentir leur propre champs. Ce qui est plutôt simple en réalité. Si on regarde où vous êtes assise en ce moment, et qu’on observe l’espace que vous occupez dans la pièce. Il ne se limité pas à votre peau. On peut parier qu’il ne se limite pas à votre peau. Ce n’est pas la forme de Ludivine qui occupe l’espace, pas plus que celle de Carola. C’est certainement plus haut par ici, plus épais par là, ça va un peu plus par là… Vous voyez… On est plus comme une amibe.
L’amibe est un peu la métaphore du champs, comme pour une cellule humaine. Mais on peut s’en servir en shiatsu, on peut utiliser notre champs. Parce qu’on peut apprendre à l’étendre, tout autour de notre receveur. Quand vous travaillez la tête, vous pouvez regarder les pieds et étendre votre champ jusqu’au pied, ou vice versa. C’est très utile. C’est un concept utile, qu’il existe scientifiquement parlant ou pas. Si on peut le disséquer à la méthode scientifique et dire que ça existe, je ne sais pas. Mais c’est un concept très utile.
Ludivine Dumontet : Okay. Carola, comment voyez-vous le futur du shiatsu ?
Le futur du shiatsu
Carola Beresford-Cooke : A l’heure où nous nous parlons, nous sommes toutes les deux confinées. Et on ne peut pas faire de shiatsu. C’est une période particulièrement intéressante pour le shiatsu. C’est même un période très intéressante, qui va jouer une grand rôle pour l’être humain, dans notre relation les uns aux autres. Car je crois que le plus difficile dans le confinement, c’est de ne pas pouvoir voir d’autres personnes, de ne pas pouvoir se toucher. Et on sait depuis toujours en shiatsu à quel point le toucher est important. Et à quel point le monde moderne est dépourvu de toucher. A quel point on substitue le toucher par d’autres chose, par d’autres formes de récompense. On passe à côté de quelque chose.
Valoriser le travail du corps et ses bienfaits pour l’être tout entier
Qu’est-ce qui va se passer ? On met des masques, de gants, des équipements de protection pour nous blinder face à l’influence des autres. Cela peut nous mener à deux options. Je pense que c’est une période décisive. Si vous m’aviez posé la question du futur du shiatsu il y a trois mois, je vous aurais sans doute apporter une tout autre réponse. Mais je pense que c’est une période décisive, et il peut y avoir deux issues. Ou bien le shiatsu et les thérapies manuelles vont être très valorisées, parce que nos clients vont réaliser qu’ils ne peuvent pas vivre sans ce type de toucher, pour retourner à leur corps, dans un monde où tout se digitalise. Ou bien on pourrait nous interdire d’exercer. On ne sait pas. Le temps nous dira, quel chemin cela prendra. Le futur du Shiatsu… Le Shiatsu n’a pas disparu.
Quand j’ai commencé il y a 40 ans, c’était une thérapie très en vogue parce que c’était tout nouveau. Et puis il y eu de plus en plus d’études scientifiques et sceptiques sur le sujet. Il y eu une entrée dans Wikipedia, qui disait « le Shiatsu c’est du grand n’importe quoi, ça n’a jamais été prouvé ». Heureusement, elle a été effacée depuis. Mais vous savez, je ne vois aucun signe comme quoi le shiatsu serait en train de disparaître, si je regarde ces 40 dernières années. Et il est en train de devenir tellement plus populaire que par le passé, voire presque « mainstream » dans certains pays. Vous en France, vous avez une superbe résurrection, félicitations ! Le Shiatsu est tellement populaire en France aujourd’hui, et c’est merveilleux, car ça n’a pas toujours été le cas.
Réglementer le Shiatsu tout en gardant la connexion du Coeur
Je constate qu’il va y avoir de plus en plus de tentatives de réglementer le Shiatsu. Et c’est pour ça qu’il est d’autant plus important de garder à l’esprit le rôle de tout ce que j’ai dit précédemment. La formation continue. L’entraînement, l’auto-discipline, la connexion à soi-même, et avec les bases, les bases fondamentales du contact humain. Je pense que cela demandera d’autant plus des efforts, que le Shiatsu se règlementera, et aussi heureusement, plus populaire, plus intégré à la médecine orthodoxe, je l’espère.
Ludivine Dumontet : je le crois également. Le Shiastu est de plus en plus connu. En France et dans d’autres pays. Et nous avons tellement de styles différents. Différentes courants. Avez-vous un message à faire passer à chaque praticien ?
Se fédérer et parler d’une seule voix
Carola Beresford-Cooke : Un message à chaque praticien de Shiatsu… Et bien, j’ai une certaine conception de comment on pourrait rendre le monde du Shiatsu beaucoup plus harmonieux. Parce que, depuis que j’ai commencé à pratiquer, je vois les gens se battre entre eux, au sujet de ce qu’est vraiment le shiatsu. Et ça a été un terrain très favorable à l’émergence de différents egos. Vous savez : « Le style de shiatsu que je pratique est le meilleur, et ton style, il est bon à jeter à la poubelle ». De façon très exagérée. Et aujourd’hui, je constate plus d’enclin au respect, mais je constate encore de façon latente, comme on le voit énormément en Chine et au Japon : « Mon gourou est le seul valable, et le tien n’est pas aussi bon que le mien. »
Mais, vous savez, ça ne nous aide pas, pas du tout. Ces dernières années, j’animais un stage sur l’histoire du Shiatsu, qui essayait d’effacer les différentes racines qui fondent le Shiatsu, et comment nous sommes tous membres de la même famille, même si chacun pratique à sa manière cette magnifique science du toucher. Nous n’en sommes pas moins liés par le fait que nous donnons quelque chose de puissant, de manière différentes. Et ces différentes approches, correspondent à des personnes différentes. Et certaines personnes adorent recevoir une énergie très douce, comme le Zen Shiatsu, ou le Shiatsu Quantique, et d’autres vont préférer un style à la Namikoshi, plus physique, le long du crops, une jambe puis l’autre, etc.
Vous savez, on aime tous plein de choses différentes, mais on peut tous recevoir un shiatsu qui nous parle, qui résonne avec ce que nous sommes. Et j’aimerais vraiment, c’est ça mon message, j’aimerais qu’on comprenne et respecte les praticiens de différents styles, et que nous ne faisons qu’un. Ca nous serait tellement plus bénéfique, pour le futur.
Ludivine Dumontet : merci, c’est un message très…. Non, je n’ai pas de mot pour ça ! Harmonieux !
Carola Beresfort-Cooke : j’espère que c’est un message très encourageant.
Ludivine Dumontet : c’est un message très encourageant. Merci beaucoup Carola pour cette interview, et pour avoir partagé avec nous votre vision et votre expérience du shiatsu. C’était très très intéressant. Je pense que ça a plu à notre auditoire. Pour la suite, je vous dis à bientôt sur notre blog www.bienetreparleshiatsuetledoin.com. Bye, bye !
Vous aimez l’article ? Penser à COMMENTER, PARTAGER, LIKER ? et à vous ABONNER au blog pour recevoir votre bonus Do In anti-fatigue ! 😉
Pour aller plus loin :
- Carola Beresford-Cooke : « Shiatsu : Théorie et pratique«
- Shisuto Masunaga : « Zen shiatsu : Comment équilibrer le yin et le yang pour une meilleure santé«
- Tokujiro Namikoshi : « Techniques fondamentales du shiatsu Namikoshi«
6 commentaires
COLIN · 8 juin 2020 à 18 h 48 min
Très bel échange, Ludivine, entre toi et Carola!
Avec l’évolution du shiatsu et cette belle énergie de redonner une harmonie au cœur du monde du shiatsu.
Apprendre les bases puis progressivement, laisser parler son cœur…
Merci à toi,
Karen
Ludivine · 9 juin 2020 à 14 h 30 min
Merci Karen pour ton commentaire !
Tout à fait. Apprendre, puis progressivement, dépasser la technique, lâcher prise, et laisser parler la dynamique du Coeur 😉
A bientôt,
Ludivine
simona · 8 juin 2020 à 23 h 54 min
Merci pour cette belle interview. Je pense que Carola a raison de dire que tous les styles de shiatsu ont raison d’exister. Et je pense qu’un bon thérapeute doit être capable d’utiliser plusieurs langages shiatsu pour être efficace en fonction des besoins du receveur. Tout d’abord l’écoute! Et pour apprendre à écouter, il faut vraiment un long entraînement et apprendre à faire taire l’esprit (tête) et l’ego.
Je pense qu’il serait utile de réformer les écoles qui l’enseignent, à partir des bases plus approfondies d’étude de l’anatomie et biomécanique jusqu’à la partie la plus énergétique et subtile des champs électromagnétiques.
Ludivine · 9 juin 2020 à 14 h 28 min
Bonjour Simona,
Merci pour ce témoignage. Je suis tout à fait d’accord avec vous sur la tolérance, l’ouverture et le respect que prônent Carola. Egalement tout à fait raccord avec la réforme des écoles, dans l’ordre évoqué 😉 . Ainsi, nous gagnerons en crédit dans la médecine intégrative.
A bientôt,
Ludivine
Chanel · 22 mars 2021 à 10 h 08 min
Merci beaucoup Ludivine pour le partage de cet interview avec notre grande Carola, profond, authentique, joyeux.
Ludivine · 22 mars 2021 à 11 h 00 min
Merci beaucoup Marianne pour ce retour ! 😉