Bien qu’à peu près n’importe qui puisse un jour connaître le burnout, il me semblait intéressant de le traiter du point de vue des surdoués. En effet, cette population d’individus concentre à un haut niveau tous les ingrédients qui lui permettent de tomber dedans, et ce sont souvent des personnes que je retrouve en cabinet 😉
Cet article a pour but de montrer les liens entre la surdouance et le burnout, les mécanismes à l’œuvre, et de donner des pistes de prévention et d’accompagnement par le shiatsu.
Il s’appuie sur ma propre expérience personnelle ainsi que sur celle des jushas suivis en séances individuelles en cabinet.
Surdouance et burnout
Quand on est surdoué, haut potentiel – ou encore zèbre pour les intimes 😉 , notre rapport au monde est souvent à fleur de peau. Avant qu’on ne le sache – parce que bien évidemment, on ne le sait souvent qu’après qu’il y ait déjà eu quelques dégâts 😉 – nous nous sentons tellement différents qu’on s’en culpabiliserait presque ! Surtout quand notre entourage ne comprend pas et que l’on s’entend dire depuis notre plus jeune âge des phrases du genre « Tu ne fais jamais comme tout le monde !« , « Tu as toujours un truc qui ne va pas « . Ou encore : « Tu es bizarre », « Tu es fragile ».. Et j’en passe et des meilleures. Bref 🙂
Notre système de pensée – rapide, intuitif, arborescent (paraît-il), couplé à une hypersensibilité hors normes, font de nous des êtres parfois en souffrance. La surdouance nous place souvent dans cette position délicate, voire désagréable, qui fait que nous avons toujours l’impression d’être en décalage, soit trop en avance, soit trop en retard 😀 . Comme si nous n’arrivions pas à nous adapter au monde (ou lui à nous? 🙄 …). Nous voyons ce que personne ne voit, et comprenons avant tout le monde comment les choses vont tourner si on ne fait rien.
De fait, notre « connexion » exacerbée à tout ce qui nous entoure – grâce à (ou à cause de? ) un cerveau qui ne se repose jamais, nous donne une empathie et une hyperconscientisation de ce qui est juste ou pas, et de notre responsabilité envers le vivant. Cette attitude dépasse totalement la majorité de nos semblables… Et nous isole. Nous sommes aussi pour la plupart perfectionnistes –voire suicidaires il faut bien le dire 😀 . En effet, bon nombre d’entre nous ont poussé leur altruisme à ses limites au détriment de leur propre être, et ont fini effondré dans un burnout plus ou moins violent, avec plus ou moins de conséquences…
Voyons maintenant plus précisément quels sont les mécanismes en jeu, et comment prévenir et accompagner le burnout avec le shiatsu ? 😉
Un burnout n’est pas une dépression
C’est un point de départ important selon moi. On a longtemps fait l’amalgame entre les deux. Or depuis quelques années, le burnout est bel et bien défini comme un épuisement physique, mental, et émotionnel qui peut être lié ou travail, ou pas. Le « vide hormonal » créé par cet épuisement peut logiquement mener à une dépression. En effet, quand toutes vos réserves sont à plat, vous ne secrétez plus correctement votre D.O.S.E (Dopamine. Ocytocyne. Sérotonine. Endorphines) de bonheur, et vous pouvez sombrer en dépression. Mais ce n’est pas automatique. Tout dépend de votre état d’épuisement, de votre terrain, de votre environnement, etc. L’important est d’être bien entouré et d’avoir un bon médecin qui vous fera le diagnostic le plus juste et adaptera le traitement – médicamenteux ou pas, en conséquence.
Un cerveau en effervescence permanente
Le premier point qui caractérise un surdoué, c’est le fonctionnement particulier de son cerveau. Ce dernier a en permanence besoin d’être stimulé. Il s’ennuie vite si on ne lui donne pas à manger 😀 . Il est avide de connaissances en tout genre, et plus c’est complexe, plus ça lui plaît 😀 . L’hémisphère droit est sans surprise le plus développé, ce qui engendre une créativité phénoménale, un sens du détail et de la perfection assez déroutant pour le commun des mortels.
Ça, c’est bien quand on est dans son coin. Mais comme tout à tendance à être en excès chez le surdoué, le perfectionnisme peut s’avérer délétère dans le monde du travail. L’obsession de tout contrôler peut aisément mener à l’épuisement, et donc, au burnout. Ce besoin excessif de contrôle n’est pas lié au plaisir d’avoir du pouvoir sur les choses et les gens, mais au besoin d’être rassuré que tout roule, qu’on ne risque rien. Ainsi, on s’éloigne de celle qui ressort en toile de fond de toutes nos angoisses existentielles : la mort.
Notre rythme de travail se trouve bien souvent en dissonance totale avec la bienséance. Trop d’impatience – et donc d’intolérance parce que notre super-cerveau a un temps d’avance sur tout et sur tout le monde – y compris parfois sur nous-même (« j’ai du mal à ME suivre » LOL ! :/ ). Ou alors trop de lenteur, parce que nous analysons tout et tout le monde en permanence pour être sûr de ne pas se tromper, de bien faire, de rentrer dans le rang. Cette hyperactivité cérébrale est très éprouvante pour le corps. Les personnes qui arrivent en cabinet somatisent beaucoup leur état, et ont des douleurs erratiques un peu de partout.
Un besoin d’exister et de reconnaissance exacerbé
Un autre point frappant et commun aux surdoués est ce besoin criant d’exister, de pouvoir déployer ses racines et ses branches à son aise. Encore une fois, c’est bien si l’on est tout seul dans sa grotte 😀 . Mais cela peut vite devenir problématique dès que l’on doit se conformer à un cadre ou à une institution (l’entreprise entre autre).
Comme nous voulons absolument éviter le rejet, nous essayons de nous adapter tant bien que mal à l’environnement, quitte à dire exactement le contraire de ce que souhaitons dire, ou à agir à l’opposé de ce que nous sommes profondément. Nous étouffons plus ou moins inconsciemment notre vraie personnalité…. Parfois d’ailleurs nous ne savons plus vraiment qui nous sommes, tellement nous réfléchissons en permanence à comment agir, penser, dire, faire, pour ne pas heurter l’autre. Mais à force de vouloir rentrer dans le moule, on ressemble à une tarte, n’est-ce pas ? 😉 Il en résulte que nous ne comprenons souvent pas le monde, et vice versa :/
Le regard des autres devient alors un enjeu de vie ou de mort. Nous ne faisons plus le distinguo entre nos actes et notre personne. Toute remarque est vécue comme un véritable tsunami émotionnel, un abandon, un désamour :/ . Et comment réagit le surdoué face à tout ça ? Il se sur-engage 😀 . Il se surinvestit pour être reconnu et aimé, dans toute les sphères de son existence. Dans ses relations comme au travail, quitte à faire passer les besoins et désirs des autres avant les siens ! On comprend aisément encore une fois que le petit-démon-burnout n’a plus trop d’effort à faire pour passer la porte de notre existence…
Une hypersensibilité et une empathie omniprésentes
L‘hypersensibilité du surdoué est à la fois psychique (émotions), mais aussi sensorielle (bruit, odeur, chaleur, froid, etc.). Nous avons par conséquent – et paradoxalement !, autant besoin des autres que d’être seul. Besoin des autres, car les nourritures affectives revêtent une importance capitale pour nous. Et besoin d’être seul pour donner un peu de repos à notre cerveau et à notre corps, pour nous ressourcer.
Nous aimons la présence humaine ; elle nourrit notre intellect et notre Coeur. Mais elle est vite envahissante et pesante. Il est alors temps d’aller s’enfermer dans notre cocon pour méditer, aller se balader en forêt, ou exercer un sport individuel pour recharger les batteries 😉 . La présence d’autrui nous nourrit autant qu’elle nous épuise… Dans un travail où nous avons beaucoup de collègues, des supérieurs, et des prestataires à qui nous devons rendre des comptes tous les jours, la cocotte minute finit tôt ou tard par sauter et nous sombrons dans le burnout.
Notre hypersensibilité conduit irrémédiablement à une empathie démesurée. Nous nous posons généralement – parfois à notre insu !, comme sauveur du monde. Nous sommes convaincus corps et âme que nous sommes là pour réparer l’injustice. Cette dernière génère en nous des accès de colère et de frustrations difficilement contenables. C’est d’ailleurs pour cela que, comme nous faisons passer les besoins et désirs d’autrui avant les nôtres, et que nous ne voulons surtout pas risquer le désamour, nous nous oublions, et retournons notre colère et nos frustrations contre nous. Cela crée une dépression interne, un rejet de soi, un épuisement qui mènent droit au burnout… La culpabilité nous envahit, nous n’avons plus de considération pour notre personne, ni d’amour. C’est l’effondrement sur soi…
Comment le shiatsu peut prévenir et accompagner le burnout ?
De ma propre expérience en tant que jusha, et de ceux avec qui je travaille, les meilleurs résultats en séance individuelle pour accompagner un burnout naissant ou installé sont obtenus en travaillant de la façon suivante :
1 Restaurer l’énergie du Rein.
C’est la première étape. Quand le jusha est au bord de l’épuisement ou déjà dedans, on observe un grand vide de Yang du Rein. Le Rein étant notre socle vital, il est primordial d’en restaurer l’énergie. Cette base ainsi renforcée, nous allons pouvoir construire les autres étapes du travail.
2 Restaurer la Terre et le Feu
Dans le cas du burnout, l’assise dans le monde du jusha, son ancrage, a bien souvent disparu. Il en découle une acceptation et un amour de soi oublié. Restaurer l’énergie de la Terre et du Feu est donc la deuxième étape pour regagner en équilibre.
3 Travailler le Métal
Seulement après avoir travaillé les 2 premières étapes (souvent après quelques séances), j’aborde le Métal. Ce travail va aider à restaurer le rapport au monde extérieur initialement coupé. Il va permettre de gagner en confiance, de travailler la place du jusha dans le monde, et de pouvoir de nouveau aborder la communication avec les autres plus sereinement.
4 Travailler le Bois
Un surdoué en burnout est un individu dont l’expression de sa nature profonde a été étouffée. Le développement et l’épanouissement de sa véritable identité créative refoulée. Le burnout, c’est ainsi la frustration, la colère que l’on retourne contre soi. Une fois le gros œuvre achevé, j’attaque les finitions en travaillant le Bois. Ce dernier permet au jusha de retrouver une direction, une orientation à sa vie, d’être mieux en phase avec ses besoins. Le Bois ainsi nourri va permettre à l’individu de se déployer à nouveau, tel l’arbre qui exprime toute sa personnalité épanouie à travers le déploiement radieux de ses racines et de ses branches.
La surdouance est un trésor
Quand on a réalisé que la surdouance est un trésor plus qu’une tare, il est important de prendre conscience que cela fait partie de nous de façon permanente. Comme la couleur de nos yeux 🙂 . Et que par conséquent, l’adaptation au monde extérieur a ses limites : si vous êtes photosensible, vous n’allez pas bêtement vous exposer au soleil pour faire plaisir à votre ami, parce qu’il vous taquine en vous traitant de fragile (et que vous voulez lui prouver que si, vous pouvez le faire, que vous êtes comme les autres).
De la même façon, vous allez devoir trouver un travail, et plus généralement, un environnement de vie, physique et social, dans lequel vous vous exposerez le moins possible.
Dans tous les cas, il est important de ne pas se culpabiliser d’être différent ; différent veut simplement dire cela : DIFFÉRENT, ni mieux, ni moins bien.
Et puis, depuis quand suivre le troupeau est une bonne chose ? Si tout le monde saute du pont, vous y allez vous aussi? 😉
La diversité est ce qui fait la richesse de notre monde. Pour peu qu’on l’accepte, c’est une magnifique leçon de vie 😉
CONCLUSION :
–> le burnout est différent d’une dépression
–> les surdoués sont facilement sujet au burnout.
–> le fonctionnement du cerveau du surdoué épuise facilement ce dernier.
–> son hypersensibilité et son empathie le rendent à la fois solitaire et altruiste.
–> l’adaptation au monde chez le surdoué a ses limites physiologiques et psychiques.
–> trouver un environnement de vie (physique et social) adéquat s’impose pour l’équilibre du surdoué.
–> être surdoué n’est pas une fragilité mais un mode de fonctionnement hors normes.
Shiatsument vôtre 😉
Ludivine
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Pour aller plus loin :
– L’excellent livre de Jeanne Siaud Facchin « Trop intelligent pour être heureux ? l’adulte surdoué »
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